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Du Cabiau à Kinshasa
20 janvier 2008

Pointe Noire la bien nommée…

pyramide_pointe_noirePour les fêtes de fin d’année, je me suis rendu avec quelques amis à Pointe Noire, la capitale économique de l’autre Congo, le petit frère d'en face. Le but du voyage ne devait pas nous faire décoller des pâquerettes. Plages, crustacés et cocotiers, nous étions d’abord là pour recharger les batteries. Mais cette première traversée du fleuve a tout de même inspiré quelques réflexions dont je voulais vous faire part.

Première réflexion : le jardin parisien

medium_brazza_petitjournal_detail_Si on exclut Rome et le Vatican, Kinshasa et Brazzaville sont les deux capitales les plus proches du monde. Seul le fleuve les sépare. Mais en l’absence de pont, il les sépare rudement bien. En quelques centaines de mètres, vous passez d’un univers à un autre.

On m’avait dit que je serais surpris par le calme de la ville, son côté provincial. C’est vrai que Brazza est un gros village comparé à Kinshasa. Mais il n’y a là rien d’étonnant. En revanche, j’étais nettement moins préparé à cette sensation de débarquer en France ou disons en Afrique française, pour rester correct. En traversant le fleuve, on entre dans cet immense jardin parisien qui court du Maghreb à l’Afrique Centrale.

Je n’avais pas encore un pied à terre qu’un officier des douanes congolaises se présentait devant moi affublé d’un drapeau tricolore… bleu-blanc-rouge! Son uniforme semblait tout droit sorti d’un épisode de Julie Lescaut. Je n'aurais pas été surpris qu'il prenne l'accent marseillais pour réclamer mes papiers. 

mausol_e_BrazzaQuelques centaines de mètres plus loin, un mémorial monumental est érigé à la gloire de Pierre Savorgnan de Brazza, l’explorateur français qui a découvert le pays. J'ai dû me pincer. Un panthéon à la gloire de la colonisation française. La première pierre a été posée par Jacques Chirac en… 2005!!! Il aura coûté la modique somme de 15 millions d'euros.

Sur la route de l'aéroport, le chauffeur du taxi voulait me convaincre que nous n’étions pas dans un DOM-TOM, je commençais sérieusement à en douter. Une multitude de détails rappellent l'in... ... fluence de la France dans la région. Alors que Kinshasa a déboulonné depuis longtemps ses statues coloniales, on peut souhaiter au voisin d’en face que le XXIème siècle sera celui de l’indépendance...

Seconde réflexion : la malédiction du pétrole

Par le passé, la région était surtout réputée pour ses esclaves. En trois siècles, plus d’un million et demi de personnes ont été déportées au départ de ces côtes. Aujourd’hui c’est une autre forme d’or noir qui attire les occidentaux sur la façade atlantique de l'Afrique.

TotalPointe Noire la bien nommée est ma première aventure pétrolière. Mon premier contact avec cet univers opaque et visqueux qui malheureusement domine le monde. Bien sur, nous ne sommes pas à Dubaï mais le pétrole et Total sont ici omniprésents. A la nuit tombée, les plateformes scintillent à l'horizon. Elles illuminent l’océan. C’est joli. Mais le charme est vite rompu si l’on creuse un peu.

De part et d’autre du boulevard Charles de Gaulle (Ca ne s'invente pas!), le centre ville est propre, sur, parsemé de grosses villas et d’hôtels hors de prix. C’est la face émergée de la manne pétrolière. Deux kilomètres plus loin, la cité est défoncée, oubliée… comme ailleurs. Décidemment, le pétrole ne profite pas à tout le monde.

A en croire Global Witness (2005), mon impression n’était pas tout à fait erronée : « La République du Congo illustre clairement combien une mauvaise gestion des revenus pétroliers, en plus d’empêcher les pays de s’enrichir, peut instaurer un environnement où règnent corruption et instabilité. » Le pétrole a rapporté trois milliards de dollars à l’Etat congolais en 2006 (750$ par habitant). Pourtant, plus des deux tiers de la population vit avec moins de 1$ par jour. Curieuse répartition…

Troisième réflexion : le rayonnement de Kinshasa

galeries_presidentielles_de_KinshasaA 600 km, Kinshasa est dans toutes les têtes. L’attraction économique de la capitale voisine s’est effondrée avec les années. Mais son influence culturelle et sociale reste énorme. Il faut dire que Kinshasa seule, c’est deux fois la population du Congo-Brazza. Chaque année, des milliers de Kinois s’en vont chercher un revenu dans les régions environnantes. A Pointe Noire, on a parfois le sentiment qu’ils ont colonisé la ville. La musique kinoise est partout, dans les bars comme dans les taxis.

Dès qu'on parle de "la métropole", on suscite une foule de réactions. Le plus souvent elles sont positives. Ceux qui l'ont connue sont généralement nostalgiques. C'est vrai que ça bouge nettement plus de l'autre côté du fleuve. Kinshasa continue donc de fasciner et garde une aura impressionnante. Les heures de gloires de Kin-la belle n’ont pas été oubliées et beaucoup refusent de croire qu'elle est aujourd’hui largement délabrée. Le mythe a la vie dure...

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Commentaires
S
bonjour savez vous ou je pourrais trouver des statistiques concernant le nombre d'expatries au congo et plus particulièrement sur Pointe Noire<br /> Merci par avance<br /> Bonne fin d'année
C
Décidément, trop de gens sont victimes de leurs complexes et cela les empèchent de s'exprimer librement, spontanément.<br /> Je ne dis pas cela pour l'auteur du blog qui me semble afficher ses découvertes et ses sentiments avec une grande bonne foi - d'autres diront une naiveté.. Mais je préfère ce comportement positif à celui de certains commentateurs, probablement victimes d'avoir trop lu et pas assez vécu.<br /> Très bien ce blog, franc et sans prétention ! Go on !
U
ce débat à l'air intéressent...une passe d'armes en ordre!!!<br /> je pense que la colonisation à laissé des traces dans la mémoire collective plus amer que sucrée et que donc il serait plus delicat de ne pas en vouloir rechercher les cotés positifs puisq on es d'accord pour dire qu'il etait globalement négatif...en occident l'on peut mm pas oser vouloir se pncher sur 'les bienfaits' du régime nazi...peut etre q'il y en a coe ds tte entreprise humaine ms le fait qu'en général ce fut un régime abonible nous interdit de vouloir en rechercher à la loupe les points positifs!c'est mm pénalement repréhensible!!!!<br /> et plus en parlons de la culture, qu'est-ce la culture?existet-il un etre humain sans culture?...doncm foi l'eefort francais etait celui de détruire la culture congolaise au profit de la sienne!!!! c'est un point de vue à débattre!
C
Merci à tous d'enrichir ce blog avec vos opinions.
M
Bonsoir à tous ceux qui ont répondu,<br /> <br /> Avez-vous seulement constaté la levée de bouclier dès lors que l'on ose avancer que le mot "colonisation" ne rime pas toujours avec "désolation"?<br /> Et il est étrange de répondre "morts" lorsqu'on parle culture.<br /> Pour ce qui est des références littéraires, il n'est pas toujours mauvais de changer de point de vue et par exemple, de lire "God bless Africa", même si le livre peut être controversé. Gare à la pensée unique!<br /> Certes la colonisation a eu son lot d'atrocités, comme bien d'autres idéologies, mais, pour ce qui est des "morts", nous pourrions aussi nous pencher sur la courbe de la croissance démographique en Afrique pendant la période coloniale.<br /> La culture, ma foi, je ne mésestimerai pas l'impact culturel belge au Congo ex-Zaïre, mais il me semble que sertains écrivains comme L Senghor, Amin Maalouf, François Cheng etc... témoignent d'un effort français dans ce domaine et dans le monde entier, même si on ne peut parler de culture de masse qui, d'ailleurs, n'existait pas plus en Europe au début du XXe siècle (la période coloniale est finie dans les années 60). Rappel aussi de l'impact formateur (hélas) du Parti Communiste français qui a vaillamment formé des gens comme Pol Pot au Cambodge.....<br /> Sur le dernier point, Dieumerci, je ne vous contredirai pas, mais où avez-vous vu que des états qui ne faisaient pas passer en priorité leurs propres intérêts? Ces dictateurs étaient soutenus par l'état français, certes. Mais, au Congo ex-zaîre, la démocratie a t-elle été plus florissante? Et faut-il imposer un modèle démocratique, des valeurs politiques qui ne coincident pas forcément avec la culture d'un pays et là, je parle de culture africaine? L'Afrique a connu de grandes monarchies, mais je ne suis pas au courant de grandes démocraties ou du moins, le modèle démocratique ne se décline pas de la même manière sur ce continent qu'n Europe. Alors, le respect ne serait-il pas de les laisser tatonner pour trouver leur propre modèle de gouvernance sans toujours imposer le nôtre?<br /> Je vous prie de m'exuser d'avoir été un peu longue et j'espère ne pas soulever encore quelques vieux démons.<br /> Marine<br /> PS: il y a une vidéo sur le net où l'on voit un monsieur congolais fort respectable, probablement en charge de la conservation du patrimoine culturel à KIN, qui déplore que peu d'édifices de la ville ont été conservés, amputant ainsi les kinois de leur mémoire collective et tout cela.... devant une arche où avait disparu ... la statue du roi des belges!!!!! ;-)
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